La Société d'Art et d'Histoire de Sarlat et du Périgord Noir

 
BULLETIN n°116 -1er trimestre 2009
Sommaire des bulletins

Voyage en Périgord avec Art et Histoire en Périgord Noir

A l’image du beau portrait ornant sa couverture, le bulletin n° 116 d’Art et Histoire en Périgord Noir, propose, outre les habituels comptes rendus de la vie de la société, un très intéressant article d’Anne-Marie Cocula sur la vie et l’œuvre de Fénelon.

Né en 1651 au château de Sainte-Mondane, cadet d’une des plus illustres familles de la noblesse périgourdine, les Salignac-Fénelon, qui avaient donné depuis le XIe siècle tant d’officiers civils ou militaires à la monarchie et tant d’évêques à l’Eglise – le diocèse de Sarlat était presque considéré par les Salignac comme un droit réservé – le jeune homme est promis très tôt à une carrière ecclésiastique. Au travers d’un brillant cheminement historiographique, Anne-Marie Cocula élargit la vision un peu étroite que l’on a généralement de cet illustre Périgourdin que l’on cantonne dans ses rôles éducatifs : l’éducation des filles, quelle nouveauté ! et l’éducation d’un prince que l’on prépare au métier de roi, la duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XIV. Mme Cocula nous montre que la personnalité de Fénelon est riche et multiple. Elle en dégage la complexité : homme d’Eglise et aristocrate, à la fois mystique et réaliste, pouvant se montrer doux et docile, le Cygne de Cambrai, mais aussi terriblement combattif, la lettre critique de ce prince de l’Eglise au prince de ce monde est un modèle de courage. Sa théorie du bon monarque s’inscrit en contrepoint de la politique de Louis XIV. Elle est avant tout guidée par une idée force : le pacifisme. La guerre est pour Fénelon le mal absolu, mais il y a plus, Fénelon s’arraque aussi à l’administration mise en place par le roi et l’on devine l’irritation de l’aristocrate quand on sait que Louis XIV a systématiquement écarté la noblesse du pouvoir. Pour Fénelon, il n’y a pas de doute : le bonheur est dans le pré ; bien plus que l’industrie, c’est l’agriculture qui peut rendre l’homme heureux. On a pu parler d’une théorie du regret de l’âge d’or et d’une volonté de retour en arrière typiquement réactionnaire au vrai sens du terme.
Fénelon qui décède en 1715, quelques mois avant le roi Louis XIV, apporte par ses réflexions sur l’Autorité, la Société, l’Education et à travers sa sensibilité et sa spiritualité, des germes qui ont pu enrichir la pensée philosophique du XVIIIe siècle. Mais ne nous hâtons pas de faire passer Fénelon pour un précurseur de la Révolution comme certains seraient tentés de le faire, il y a très loin des idées aristocratiques et dévotieuses de cet homme mystique à l’athéisme forcené ou au déisme froid des hommes de 1793. Mme Cocula d’ailleurs ne s’y trompe pas, elle se contente avec bonheur d’intégrer les idéaux de Fénelon dans ce creuset bouillonnant des idées des philosophes du XVIIIe siècle que l’on nomme Lumières.

Francis Guichard nous fait ensuite pérégriner. Déjà proposé aux lecteurs dans le précédent bulletin, le voyage d’Edouard Harrisson Baket (1892-1893), commencé dans la vallée de la Dordogne, se poursuit à la découverte de la vallée de la Vézère. Par voie fluviale sur de fragiles embarcations à fond plat, terrestre en cheminant aux flancs des falaises calcaires qui sont comme les marchepieds des collines, ou souterraines, dans des cavernes où il fallait ramper sur nos mains et nos genoux et, à quelques endroits, nous aplatir complètement, Baker remonte la vallée de la Vézère d’Alles à Peyzac-le Moustier, en passant par tous les lieux aujourd’hui si fréquentés par les touristes mais peu connus en cette fin du XIXe : Les Eyzies, La Roque de Tayac, La Madeleine, Tursac et La Roque Saint-Christophe ; un paradis d’une exceptionnelle richesse pour les savants chercheurs d’os préhistoriques et de silex taillés.
Cet Anglais curieux, aventureux et poète à ses heures, nous livre ses descriptions savoureuses, ses aventures personnelles, ses rencontres avec des Périgourdins parfois bizarres mangeurs d’escargots crus – à défaut d’huîtres – ses considérations sur les hommes préhistoriques, ses réflexions sur l’homme d’aujourd’hui et parfais même son éblouissement devant un coucher de soleil les crépuscules du Sud qui mettent soudainement et presque sans avertir un baiser rose sur la rivière…

Alice Legendre propose, quant à elle, un périple d’une toute autre nature, mais d’un intérêt majeur : l’exode des musées français pendant l’Occupation. Elle nous explique que, dès 1938, un plan d’évacuation des œuvres d’art des musées du Louvre ou de Versailles avait été élaboré. Dans un premier temps, les œuvres sont mises en sécurité, croit-on, dans les vastes châteaux des bords de Loire, mais devant l’avance allemande, la plupart des tableaux sont dirigés plus au sud, notamment dans des châteaux quercynois. En 1942, les Allemands franchissent la ligne de démarcation, leurs blindés arrivent dans le sud. L’exode des tableaux se poursuit d’autant plus qu’il faut protéger aussi les musées de Toulouse et de Montauban, les châteaux de la Treyne et de Montal se révèlent insuffisants. On réquisitionne alors des châteaux en Dordogne notamment dans notre Périgord Noir : les châteaux de la Poujade, commune d’Urval, et de la Bourgonie, commune de Paleyrac ; les deux domaines appartenant à la famille de Commarque.
Alice Legendre nous fait vivre les mille difficultés de ce précieux gardiennage qui se poursuivra jusqu’en 1945, le rôle du chef de dépôt, représentant des musées nationaux, n’était pas de tout repos, il était à la fois responsable de la sécurité, du personnel, de l’intendance, des relations avec les propriétaires et devait aussi assurer la police dans le groupe. Le récit d’Alice Legendre est d’autant plus vivant que le gardien du dépôt de la Bourgonie, à Paleyrac, n’était autre que son père, Jean Roche.

Le bulletin se clos par un document retrouvé avec la complicité de Claude Lacombe dans un grenier de la commune d’Archignac, l’itinéraire du conseil de révision en Périgord en 1881.

Si vous voulez en savoir plus sur ces études et sur celles précédemment parues, vous pouvez consulter le site Internet de la Société en tapant http://ahspn.free.fr. On peut d’autre part se procurer des numéros du bulletin en écrivant au secrétariat de la Société d’Art et d’Histoire de Sarlat et du Périgord Noir, B.P. 47 – 24201 Sarlat cedex ; ou auprès de la Maison de la Presse, de la librairie Majuscule ou encore à L’Orange bleue à Sarlat.


 

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